• Picasso (1881-1973)

    La lecture d'un article d'Alice Miller dans "La souffrance muette de l'enfant" nous apprend beaucoup sur cet artiste prolifique et inventif. A une exposition des oeuvres tardives de Picasso organisée à Bâle, Alice Miller relève une souffrance qui semble trouver son origine dans l'enfance du peintre. On le savait en lisant la plupart des biographies : cet artiste n'a jamais réalisé de dessins d'enfant. "Il avouait lui-même qu'enfant il n'avait jamais peint que des tableaux d'adulte, et qu'il lui avait fallu quarante ans de sa vie pour arriver à peindre comme un enfant, autrement dit, pour laisser parler son inconscient. "Ce qui lui fera dire avec humour " Il faut très longtemps pour devenir jeune". Très tôt il copie les colombes que son père (professeur de dessin) peint et il apprend à observer dès son plus jeune âge. Ce qu'on sait moins, et que nous révèle Alice Miller, c'est que le petit Pablo a vécu un terrible tremblement de terre à l'âge de trois ans, très peu de temps avant la naissance de sa première sœur Dolorès. "Que l'on essaie d'imaginer ce que peut provoquer, chez un enfant de trois ans, le fait d'être conduit par son père, dans l'obscurité, en plein tremblement de terre, avec sa mère enceinte, à l’autre bout de la ville, dans un appartement inconnu où il va assister à la naissance de sa sœur." Et Alice Miller de poursuivre "A cela viennent s'ajouter chez Picasso deux facteurs supplémentaires : son père lui a appris à aiguiser son regard, et sa mère à garder le silence. Le don d'observation a été cultivé chez l'enfant dès son plus jeune âge, mais il ne fallait pas traduire par la parole ce qu'on avait vu."  Le jeune artiste est admiré par les parents. "Le plus cher désir du père était de voir son fils devenir un peintre célèbre, ce que lui-même avait cruellement regretté de ne pas réussir. Et le plus cher désir du fils était de se faire aimer de son père." L'école primaire est pour lui un doux calvaire et on le retire rapidement sans qu'il acquiert les fondamentaux. La seule chose qui le motive est le dessin à travers lequel il sent toute l'admiration du père. Beaucoup de biographies signalent le décès de sa seconde sœur Conchita d'une diphtérie en 1895. Pablo (14 ans)  reste très affecté par cette disparition. S'ajoute à cela le suicide de son ami Casagémas en 1901 et la mort de sa compagne Eva en 1915. La création chez Picasso sera souvent une sorte de conjuration de la mort, et comme il le dira lui même souvent une sorte d'exorcisme. Alice Miller remarque "Beaucoup de contemporains et amis de l'artiste s'accordent à dire qu'il ne se sentait véritablement vivre que lorsqu'il peignait."

     Portrait de Casagémas 1899

     « Considérer que tout ce qui nous entoure c’est ennemi » est quelque chose qui est resté en lui (Picasso) toute sa vie et c’est une des clés les plus profondes pour comprendre son art. »    André Malraux parlant de Picasso

    Picasso visite le musée du Trocadéro (futur musée de l'homme) en 1907. Confronté aux arts dits primitifs, il s'y trouve très mal à l'aise mais ne peut quitter ce lieu poussiéreux qui sent le chloroforme. Il perçoit spontanément la dimension magique de l'art nègre. « Mais tous les fétiches, ils servaient à la même chose. Ils étaient des armes pour aider les gens à ne plus obéir aux esprits, à devenir indépendants. Des outils. Si nous donnons une forme aux esprits, nous devenons indépendants. Les esprits, l’inconscient (on n’en parlait pas encore beaucoup), l’émotion, c’est la même chose. J’ai compris pourquoi j’étais peintre. » Propos de Picasso, cité par André Malraux, La Tête d’obsidienne, Paris, Gallimard,1974, p.18. « J’ai reconnu un art qui donnait à la sculpture la même fonction que moi. Il ne s’agissait pas d’imiter des formes pour les copains. Il s’agissait de retrouver une attitude fondamentale de l’artiste face à l’univers »  Picasso cité par Malraux

    Têtes des demoiselles 1907

    "La cohabitation de l’éros et du thanatos au sein des « Demoiselles » rappelle une composante particulière de la psychologie de Picasso : la crainte invétérée et son dégout du corps féminin qui coexistaient avec son désir ardent et son idéalisation extatique de ce corps. Cette ambivalence s’est manifestée maintes fois dans l’art de Picasso comme dans son comportement et s’est caricaturée dans sa réputation de traiter les femmes « comme des déesses ou des paillassons"  William Rubin Extrait de "Le primitivisme au XX°" tome I Ouvrage collectif sous la direction de William RubinOlga 1918 Olga 1928                                                                        Olga en 1918              Olga en 1928

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